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Dans une réaction consubstantielle à un article doctrinale de Sieur Harold Leckat intitulé « Du fait de sa candidature prématurée, Ali BONGO s’englue dans les restrictions constitutionnelles de l’article 11 », Monsieur Ebango Parfait a cru bon de remettre en cause ledit texte, donnant ainsi à l’analyse un caractère erroné.  

C’est au terme d’une analyse faite en 4 points, que l’auteur va asseoir sa contestation et fonder son objection face à l’article énonçant les restrictions constitutionnelles liées à la candidature du président sortant. « Président sortant », une phrase à priori anodine mais qui va se révéler être le chaînon manquant de la compréhension de l’article 11 de notre Constitution par Mr Ebango Parfait.

Aux fins de mettre à nue cette incompréhension, Que dit la Loi par ma plume, adresse une réponse synthétisée à notre contradicteur que nous remercions au passage pour l’intérêt qu’il porte à nos travaux et dont nous saluons en retour, l’effort d’analyse.

Dans son article, Monsieur Hardol Leckat exprime l’idée selon laquelle la déclaration du 29 février 2016 à Port-Gentil marquant l’annonce de candidature du président sortant, porte en son sein des restrictions d’un point de vue constitutionnelle.  

En effet, en prenant appuie sur l’article 11 de la Constitution, Harold Leckat a fait constater l’impossibilité du président déclaré candidat, de dissoudre l’Assemblée Nationale ou encore de légiférer par ordonnance.  

Légèreté et versatilité sur la quintessence de l’article 57 du Code Électoral 

Pour l’auteur, l’analyse sur le caractère juridique de l’annonce de candidature du Président de la République est erronée, car selon son entendement, elle heurterait la substance de l’article 57 du Code Electoral. La lettre de l’article 57 énonce que « Tout candidat à un mandat électif doit faire une déclaration de candidature légalisée… ».

Pour ce dernier, seule une candidature répondant aux dispositions prévue à l’article 57 du Code électoral peut se prévaloir d’une certaine valeur juridique. Étant donné que l’annonce faite par Ali BONGO ne remplit pas cette exigence, elle est pour Monsieur Parfait EBANGO amputée de base juridique. C’est pourquoi, pour ce dernier, l’annonce  de la candidature du président sortant ne le prive pas des restrictions présentes à l’article 11 de la Constitution.

Si cette analyse peut donner l’illusion d’une pertinence certaine, l’auteur en réalité s’enlise dans un profond amalgame. En effet, Sieur EBANGO fait montre d’une confusion primaire , s’emmêlant les neurones entre l’annonce de candidature d’un postulant ordinaire à la présidentielle d’une part, et sur celle visant le président sortant d’autre part.

Notre contradicteur a manqué de distinguer l’annonce de candidature, d’une déclaration de candidature. Pour sa gouverne, l’annonce de candidature est l’acte par lequel un homme porte à la connaissance de l’opinion publique sa volonté de se présenter à une élection. A contrario, une déclaration de candidature est un acte réglementé dont la matérialisation octroie à son  auteur une autorisation officielle de compétir. C’est la candidature issue de l’article 57 du Code électoral.

En ce sens, seuls les candidats lambda à une élection présidentielle doivent obligatoirement remplir les conditions tirées de l’article 57 pour faire admettre leur candidature comme acte juridique. Raymond NDONG SIMA ou encore Dieudonné Minlama Minto’o ont fait des annonces de candidature qui ne sont pas encore des déclarations de candidature. Elles ne sont donc pas considérées à ce stade comme des « candidatures légalisées » comme prévu par  l’article 57. Le président sortant, pour sa part, n’est pas débiteur de l’obligation tirée de l’article 57 du Code électoral pour faire admettre son annonce comme acte juridique.

L’article 11 de la Constitution, tiré du Titre III consacré au Pouvoir Exécutif dont le premier chapitre est intitulé « Du président de la République » consacre cette éventualité.  Et c’est ce régime particulier auquel est soumis le président de la République, candidat à sa succession qui échappe au discernement de Monsieur EBANGO.

 

Epilogue d’un amalgame sur l’article 11 de la Constitution

Dans son exposé, l’auteur conteste l’idée selon laquelle par le seul fait de son annonce de candidature du 29 février dans la capitale économique, le président se serait, eu égard à la constitution, porté candidat. Il soutient ainsi que seule la candidature répondant aux exigences de l’article 57 du Code électoral  renferme en elle un caractère juridique.

Au contradicteur d’adjoindre à cette première idée le fait qu’une candidature au sens juridique du terme requiert un écrit. C’est ainsi qu’il parle de « l’exigence d’un écrit », pour conclure que le président, de part son annonce de Port -Gentil  n’ayant pas satisfait à cette exigence, sa candidature ne peut donc être  admise comme une « une déclaration de candidature légalisée ».  Cette analyse est d’une promiscuité inouïe car elle méconnaît l’essence de l’alinéa 4 de l’article 11 de la Constitution.

L’alinéa 4 dudit article  consacre en effet, un régime juridique particulier au président de la république auquel même le Code électoral ne peut déroger. Il dispose que « Si le président en exercice se porte candidat, l’Assemblée Nationale ne peut être dissoute. Il ne peut,  en outre, à partir de l’annonce officielle de sa candidature, Jusqu’à son élection, exercer son pouvoir de légiférer par ordonnance… ». Ici le constituant parle de «  se porter candidat ».  Autrement dit, de la volonté de se présenter afin de briguer à nouveau les suffrages du peuple. Se porter candidat n’impose pas une déclaration de candidature formellement établie comme l’entend l’article 57 du Code électoral, lequel n’évoque que la déclaration de candidature.

Le 29 février 2016 à Port-Gentil, Ali BONGO s’est clairement porté candidat pour un second mandat.  L’article 11 de la Constitution, attribue donc à cette annonce de candidature un caractère juridique.

Ainsi, il n’est pas nécessaire pour le président sortant, de se  conformer à l’article 57 pour faire admettre sa candidature comme un acte juridique. L’annonce ne saurait être dépourvue d’un caractère juridique que si, elle est faite par un candidat autre que le président de la République comme Jean PING ou encore Frédéric Massavala. Ces derniers, sont astreint au respect de cet article. Une astreinte que ne partage pas le président en vue de l’obtention du caractère juridique.

En conséquence, ce dernier perd les deux prérogatives énoncées ci-dessus par l’article 11. De ce fait, l’argumentation sur l’exigence d’un écrit et les délais relatifs à la commission et les deux autres points évoqués,  s’écroulent comme un château de carte au contact de l’article 11 de la Constitution.

En sommes, cette analyse qui consiste à remettre en cause le caractère juridique d’une déclaration de candidature du président par le seul fait de l’article 57 est foncièrement factice et contrefaite car fondée sur un amalgame grossier.  

Un amalgame né de la lettre de l’article 11 de la Constitution dans son alinéa 4 visiblement méconnu par notre contradicteur.

Sur la déclaration légale de candidature

Si la déclaration du candidat-président n’est pas établie conformément aux dispositions de l’article 57 de la loi n°07/96 du 12 mars 1996, portant dispositions communes à toutes les élections politiques, il n’en demeure pas moins qu’elle affecte considérablement le fonctionnement des institutions et partant du service public.

D’abord, la primature a été la première a être troublée par cette annonce. Un communique final du conseil des ministres du jeudi 10 mars 20166 énonce : « Par la suite, à l’issue d’une communication du Premier Ministre, relative à la déclaration « d’OZOURI » au cours de laquelle Son Excellence Ali BONGO ONDIMBA, Président de la République, Chef de l’Etat, a fait part de sa décision de solliciter les suffrages de ses concitoyens pour un second mandat, le Gouvernement de la République a marqué sa forte et totale adhésion à cette candidature et a pris l‘engagement de travailler aux côtés de Son Excellence Ali BONGO ONDIMBA, Président de la République, Chef de l’Etat, pour poursuivre, dans la paix et l’unité de la Nation, l’œuvre de développement et de transformation de la société gabonaise ».

A partir de ce moment ce qui pouvait encore être perçu comme une simple déclaration devenait une affaire d’Etat. Le conseil des ministres étant le cadre institutionnel par excellence où s’exprime le pouvoir exécutif. Aussi, les propos du président l’engagent, à lui tout seul, il est une source de droit de par l’institution qu’il représente. Il donc complètement caduque et saugrenu de limiter le caractère juridique de la candidature du « Président sortant » au seul respect de l’article 57 du Code électoral.

Du fait de sa lecture inexacte d’une disposition constitutionnelle, et de sa réaction péremptoire, Monsieur Parfait EBANGO s’englue dans des intrications liées à la compréhension de l’article 11 de la Constitution.

Sur l’annonce officielle  

Le président de la République est un officiel, toute annonce dont il est la provenance revêt un caractère particulier.  

Le 29 février 2016 à Port-Gentil, Ali BONGO, fort de son statut de président de la République a bel et bien fait une «  annonce officielle » de candidature. Cette annonce de candidature pour un second mandat fut adoubée par sa formation politique le 12 mars dernier à l’occasion d’un congrès.

Le 26 mars, le candidat du Parti démocratique gabonais (PDG) à l’élection présidentielle de 2016, a reçu le soutien des épouses des personnels des Armées au camp Ntchorere rapportait la presse nationale. Le 31 mars 2016 sur Voa Africa au micro d’Idrissa Fall, en marge du sommet sur la sécurité nucléaire, Ali BONGO lui même, répond, « bien sûr » à la question de savoir s’il était candidat à l’élection présidentielle. Ceci pour les faits.

J’invite ici notre contradicteur à retenir ceci une bonne fois pour toute. En droit, l’article 11 de la Constitution, consacre un régime distinctif, exclusif au président de la république que même le Code électoral ne peut déroger. Ainsi, il attribue donc à l’annonce de candidature du président à sa propre succession un caractère juridique.

Le Titre V de la loi n°07/96 du 12 mars 1996, portant dispositions communes à toutes les élections politiques porte sur la déclaration de candidature à proprement parlé. Il  n’évoque pas l’annonce officielle. Il ne traite que des conditions de déclaration de candidature légalisée.

  1. Cour d'Appel Administrative de Monaco, 27 octobre 1969, Trésorier Général des Finances c/ C.
  2. Tribunal des Conflits, Arrêt du 25 mars 1996, n°03000, publié au recueil Lebon
  3. Nikolas Kada, Dictionnaire d’Administration Publique, Collection Droit et action publique, Edition Presse Universitaire de Grenoble, 2014, P.31-32
  4. La loi n°5/78 du 1er juin 1978 portant adoption du Code du Travail de la République Gabonaise a prévu en ses articles 44 et 45 la création d’une indemnité de services rendus, accordée à tout travailleur licencié pour motif autre que la faute lourde, ou allant à la retraite. Cette indemnité est due en cas de licenciement ou de départ à la retraite, après une ancienneté de deux ans dans l’entreprise
  5. les articles 71 et 88 des Codes du Travail des années 1994 et 2021
  6. Les agents publics non-statutaires de droit public sont des agents recrutés par l’État Gabonais par contrat d’engament de travail et qui sont soumis à un régime de droit public dont la compétence relève du juge administratif (article 2 de la loi n°3/88 du 31 juillet 1990 susvisée)
  7. Les agents publics non-statutaires de droit privé sont des agents recrutés par l’État Gabonais par contrat de travail (lettre d’engagement ou décision ministérielle) et qui sont soumis à un régime de droit privé dont la compétence relève du juge judiciaire
  8. V. Article 193 du Statut Général de la Fonction Publique
  9. Tribunal des conflits, Arrêt du 25 mars 1996, n°03000, publié au recueil Lebon
  10. Tribunal Administratif de Makokou, Jugement du 25 novembre 2020
  11. Guide de l’agent public, service de l’analyse des médias, n°4, Octobre 2022
  12. Les emplois subalternes sont des emplois de rang peu élevé dans la hiérarchie professionnelle de l’Administration. C’est en particulier le cas des femmes de ménage, ouvriers, jardiniers, chauffeurs etc...
  13. Anthony BEM, le temps pour agir en justice, la forclusion et la prescription de l’action, LEGAVOX.fr, 7 avril2016
  14. Anthony BEM, Op.Cit., p.5
  15. Cette prescription peut être interrompue lorsque l’agent public a saisi l’administration ou initié une action en justice avant l’expiration du délai de quatre (4) ans. Dans l’un ou l’autre cas, un nouveau délai recommence à courir à compter de la date de la saisine
  16. Article 88 du Code Travail 2021 pour les agents de la main d’œuvre non permanente qui sont régis par les dispositions dudit Code
  17. L’article 149 de l’ordonnance n°0003/PR/2024 du 08 février 2024 dispose que « sous réserve des dispositions de prévues par différents statuts particuliers, l’âge limite de mise à la retraite est fixé à soixante-deux ans pour les agents civils de l’État »
  18. Conseil d’État, affaire MOUGHETOU Marie Adèle, arrêt du 04 janvier 2023, ré n° 86/2022-2023 ; V. aussi, Conseil d’État, affaire Dame ENGOUANG BEKALE Jeannette, arrêt du 17 mars 2023, rép. n°013B/2022-2023
  19. CE, affaire MBOUROU Jean Hubert, arrêt du 17 décembre 2010
  20. CE, affaire EKIEMA-EVOUNG Michel, arrêt du 09 décembre 2020 ; V. aussi, CE, affaire MOUNDOUNGA KOMBILA Philippe, arrêt du 09 décembre 2020
  21. CE, affaire DIMB Olivier, arrêt du 12 Juillet 2024, rep n° 112/2023-2024 ; V. aussi, CE, affaire MANINGAUT MOGOULA Viviane, arrêt du 12 juillet 2024, rep n°23/2023-2024
  22. CE, affaire MBA Christian, arrêt du 22 janvier 2025, rep n°003/2024-2025
  23. René CHAPUS, Droit administratif général, Tome 1, 15e édition, Montchrestien, 2001, p. 1294
  24. CE, Arrêt du 12 février 2020, Rep n°107/2019-2020
  25. CE, affaire DIAMBOU Marie-Thérèse, rep 009/2023-2025, 11 décembre 2024

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