Dans la continuité de notre précédent article consacré à l’élection des maires, poursuivons cette série dédiée aux élections locales en nous intéressant à des acteurs souvent méconnus : les conseillers départementaux.
Bien qu’ils soient souvent éclipsés par les maires et les conseillers municipaux, ils occupent pourtant une place centrale dans l’organisation décentralisée du Gabon.
Mais concrètement, quel est leur rôle ? Comment sont-ils élus ? Et surtout, en quoi leurs missions diffèrent-elles de celles des maires et des conseillers municipaux ?
Département, commune : quelle différence ?
Avant de comprendre l’élection des conseillers départementaux, il faut d’abord distinguer deux notions clés : la commune et le département.
La loi organique n°001/2014 du 14 juin 2015 relative à la décentralisation, dans son article 3, les définit ainsi :
- La commune est une agglomération urbanisée, dotée de sa propre personnalité juridique, où les habitants partagent des intérêts socio-économiques communs ;
- Le département, lui, correspond à tout le territoire situé en dehors des communes.
En d’autres termes la commune, c’est l’échelon de proximité, celui de la vie quotidienne, avec ses quartiers ses marchés ou encore ses écoles primaires. Alors que le département est l’échelon supérieur qui regroupe plusieurs communes et coordonne leur développement à une échelle plus large.
Pour rappel, la décentralisation gabonaise repose sur deux collectivités locales : la commune et le département. Les provinces, pour leur part, sont des circonscriptions de l’Etat, placées sous l’autorité d’un gouverneur, et relèvent donc de la déconcentration.
Comment sont désignés les conseillers départementaux ?
Comme les conseillers municipaux, les conseillers départementaux sont élus au suffrage universel direct, comme le précise l’article 253 du code électoral issu de la Loi organique du 19 janvier 2025 (promulguée le 22 janvier 2025. Leur mandat est fixé à cinq ans, renouvelable (article 258).
Contrairement à une idée reçue, ils ne sont pas nommés par l’Etat : ce sont bien les citoyens du département qui les choisissent. La nuance est essentielle :
- Un élu rend des comptes à ses électeurs;
- Un nommé rend des comptes à l’autorité qui l’a désigné.
Autrement dit, le conseiller départemental tire directement sa légitimité du vote des habitants de son territoire.
Le mode de scrutin : comment ça marche ?
L’article 253 du Code électoral dispose :
« Les conseillers départementaux (…) sont élus au suffrage universel direct et au scrutin de liste bloquée, à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne. »
Concrètement, cela signifie que :
- Les citoyens votent pour une liste entière, sans pouvoir modifier l’ordre des candidats;
- Une liste doit obtenir au moins 10 % des voix pour avoir des sièges;
- Si une liste obtient la majorité absolue, elle reçoit automatiquement la moitié des sièges;
- Les autres sièges sont ensuite répartis selon la règle de la plus forte moyenne (articles 278 à 283).
A titre d’illustration, si un département compte 10 sièges à pourvoir et 20.000 suffrages exprimés, le quotient électoral est de 2.000 voix. Une liste qui obtient 6.000 voix gagne 3 sièges directement, et peut en obtenir davantage selon la règle de la plus forte moyenne.
Que fait le conseil départemental ?
La Loi organique n°001/2014 du 14 juin 2015 relative à la décentralisation (article 41) attribue plusieurs missions précises au Conseil départemental :
- Voter le budget du département, c’est-à-dire prévoir et autoriser les recettes et les dépenses annuelles ;
- Adopter le plan d’investissement, qui définit les grandes priorités de développement du département ;
- Décider de l’implantation et de l’aménagement des équipements collectifs (sociaux, culturels, sportifs) destinés principalement aux habitants du département ;
- Donner son avis sur toute question intéressant le territoire départemental.
En pratique cela signifie que le Conseil départemental agit sur les projets qui dépassent l’échelle d’une seule commune.
Prenons l’exemple du département du Komo-Mondah (province de l’Estuaire) :
- Une école primaire de quartier à Ntoum relève du conseil municipal de la Commune;
- Mais la construction d’un collège accueillant les élèves de plusieurs villages du département, l’aménagement d’une route reliant Ntoum à Cocobeach, ou encore la création d’un centre culturel départemental, sont des décisions qui reviennent au conseil départemental du Komo-Mondah.
Ainsi le département joue le rôle de coordinateur entre plusieurs communes, en finançant et en organisant des projets structurants pour tout le territoire, là où commune reste concentrée sur la gestion de la vie locale immédiate.
Qui dirige le conseil ?
L’article 273 du code électoral dispose:
« Le président et les vice-présidents du conseil départemental sont élus par les conseillers départementaux à la première session du conseil, en son sein, à bulletin secret et à la majorité absolue au premier tour et à la majorité relative au second tour. »
En d’autres termes le Conseil départemental est dirigé par un Président qui est la figure de proue de cette collectivité.
A retenir :
- Les conseillers départementaux sont élus, pas nommés;
- Leur mandat dure cinq ans;
- Ils représentent tout le département et planifient les grands projets;
- Le conseil départemental complète l’action du conseil municipal, en s’occupant de ce qui dépasse l’échelle communale.
En résumé, si le maire et les conseillers municipaux gèrent le quotidien de la commune, le président du conseil départemental et ses conseillers pensent le développement à une plus grande échelle : celle de l’ensemble du département.
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